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Dimanche 14 mars, lundi 15 mars 2004

Aghir

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(Midoun)

 

Djerba est l’une des destinations méridionales les meilleures marché du moment. L’île vit du tourisme principalement, et secondairement, de la pêche. Pour enrayer la désaffection provoquée par l’attentat contre la synagogue el Ghriba en 2002 et le développement de l’intégrisme musulman, les agences cassent les prix. Mais le dernier avatar du terrorisme international à Madrid laisse craindre le pire pour la saison qui s’annonce.

 


Paris, vu du hublot de l'avion

Quand on part  à des conditions aussi avantageuses, il ne faut pas être spécialement regardant. L'embarquement s’effectue à Roissy, Terminal 3, dépotoir malodorant que patrouillent des soldats armés de Clairon. Ce dimanche après midi, les consoles n’affichent que deux directions : Istambul et Djerba. Une foule d’immigrés, d’hommes calottés, de femmes voilées et d’enfants endimanchés, prend patience. Au milieu d’eux, les voyageurs européens se montrent un peu moins patients. L'avion décolle avec une bonne heure de retard.

Nous avons choisi un hôtel modeste qui ne propose que 72 chambres, les unes sur la mer, les autres, sur la " palmeraie ", quelques palmiers épars. Il appartient à une famille djerbienne et sa clientèle est française. D’autres établissements accueillent des Allemands ou des Italiens, des Belges ou des Tchèques. Le Vincci, à deux pas du nôtre, héberge en ce moment 500 vacanciers. Au Raïs, nous sommes les seuls étrangers mélangés à trois Tunisiens employés sur un chantier voisin.


Au réveil

C’est que, à trois étoiles " normes locales ", notre hôtel est le dernier des derniers. Et c'est pourtant bien assez : une chambre claire et confortable, une nourriture variée et soignée, un personnel affable et chaleureux.

Djerba a sacrifié un cinquième de son littoral aux touristes. Ils sont cantonnés dans " la zone touristique " qui s’étend à l’est, de la plage de Sidi Mahrès au nord, à Aghir au sud. Ce cordon est découpé en quatre zones. A mesure qu’on s’éloigne vers le sud, les prix et la fréquentation baissent.

Nous sommes en zone 4. Au-delà commence un terrain vague suivi d’une palmeraie morte et d’une lagune sans profondeur. C’est calme, très calme. Et à part arpenter la grève pour ramasser les coquillages échoués, os de seiches, nautiles et nacre, il n’y a rien à faire ni à voir.

Cette concentration de constructions au bord de l'eau ne donne pourtant pas les horreurs de la Côte d'Azur ou de la Costa Brava. Les édifices, bas et blancs, se fondent assez bien dans le paysage et offrent à la vue des lignes, des courbes, des masses, des rythmes qui ne sont jamais dénués d'intérêt, sinon de beauté.

Le temps est clément. La brise coupe le soleil bien présent. La mer à l’approche du rivage prend une teinte limoneuse, fonce au contact des algues qu’elle soulève, et dans le crépuscule qui s’amorce, vire au parme puis au violet. Ses laisses sont importantes. La marée atteint deux mètres d’amplitude dans le golfe de Gabès.


Le port d'Aghir

 

 

 

La morte saison commence le 5 janvier et se termine le 24 mars. Ali, le réceptionniste de nuit qui nous donne ces renseignements, parle six langues : le français, l'allemand, l'anglais, l'italien, l'espagnol et l'arabe. Il préfère les Français. Les Allemands selon lui sont tatillons, désagréables, autoritaires et souvent, dans la génération la plus âgée, racistes. Les Italiens, sympathiques, ont tendance à abuser des boissons alcoolisées. Le rêve d'Ali est de visiter la France, mais le visa est difficile à obtenir. Il connaît l'Allemagne, le Maroc, l'Egypte; pas l'Algérie - "c'est trop risqué" commente-t-il. Il est jeune, il est arabe. Il se débrouille.

L'agent du Tour Opérator qui nous a donné rendez-vous dans le hall de l'hôtel pour nous "initier" à Djerba et à l'occasion, nous proposer quelques excursions et autres divertissements, est une belle Tunisienne, serrée dans son tee-shirt et son pantalon noirs. Sa peau est sombre, ses lunettes, fumées. Elle est moderne. Elle roule en Coccinelle.

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Mardi 16 mars (le mariage berbère) - suite